Agir sur les déterminants sociaux

Dépression : maladie mentale ou problème social?

Une personne sur quatre qui consulte son médecin généraliste le fait pour des raisons liées à un problème de santé mentale. Cette statistique préoccupante témoigne, selon plusieurs experts, d’une épidémie de problèmes de santé mentale, notamment de la dépression et de l’anxiété qui sont les troubles les plus fréquemment diagnostiqués. Comment réagir face à un tel constat?

Répondre à cette question nous amène inévitablement à nous questionner sur les causes de cette « épidémie » et donc sur les causes de la dépression. S’agit-il d’une condition biologique, d’un dysfonctionnement cérébral? Ou, au contraire, la dépression est-elle plutôt la conséquence de conditions environnementales difficiles?

Il semble que la majorité des études actuelles au sujet de la dépression se concentrent surtout sur les ramifications biologiques et génétiques de ce trouble; fournir une compréhension des mécanismes biologiques associés à la dépression permettraient le développement de thérapies pharmacologiques plus efficaces. Adopter ce point de vue positionne donc clairement la dépression comme un problème biologique dont la solution est essentiellement curative et réside dans la chimie du cerveau humain.

Cette position n’aide toutefois pas à résoudre l’énigme de base : pourquoi constate-t-on actuellement une hausse des problèmes de santé mentale dans la population? Comment peut-on expliquer une hausse fulgurante des cas de dépression et des suicides dans des localités où les taux de chômage sont très élevés? Comment expliquer que les traumas vécus pendant l’enfance constituent des prédicteurs  significatifs d’épisodes psychotiques à l’âge adulte? Quelles pistes la biologie peut-elle nous apporter pour répondre à ces questions?

Et s’il fallait plutôt ajouter une perspective pour répondre à cette question? Bien évidemment, tout comportement humain a un lien avec le cerveau; nier les implications biologiques associées à la dépression semble une absurdité. Pourrait-on toutefois penser que les réponses ne résident pas seulement à l’intérieur du cerveau? Le cerveau n’évolue pas en vase clos; il est constamment en relation avec l’environnement social. L’individu s’y adapte, le modifie, y réagit. Et si nos conditions de vie, de travail, nos exigences sociales de performance et d’autonomie créaient une pression telle que, à certains moments, les individus n’arrivent tout simplement pas à y répondre et réagissent en s’effondrant dans une forme d’impuissance?

« Quand autant de gens souffrent, le problème ne peut pas être seulement dans le cerveau, il est social. » Cette perspective permet d’ouvrir la voie à des réponses différentes. Si l’environnement social a un rôle à jouer dans l’apparition des problèmes de santé mentale, il y a fort à parier qu’une partie des solutions s’y trouve également.